Page:Gasquet - Les Chants séculaires, 1903.djvu/76

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10 CHANTS SÉCULAIRES Qu’une nymphe cachée au fond de la ravine Écarte pour le voir son rideau de lauriers. Et les bœufs indolents, rêveurs comme leur maître, Beuglent en s’attardant à l’ombre des mûriers. Beaux jours de l’Age d’or, jours d’antique bien-être, Images du bonheur, vous reviendrez peut-être, Vous ressusciterez en quelque œuvre immortel. La France sans moissons meurt sous des mains indignes beaux jours pleins de blés, de lauriers et de vignes. Je veux vous élever un séculaire autel. De siècle en siècle, ô Jours, battus par les tempêtes, Vous venez, apportés par la voix des poètes. Vous coulez comme un fleuve au fond des larges vers. Dans sa pauvre maison, dont vous faites un temple, Loin des champs dévastés, le Sage vous contemple. Vous flottez au-dessus de ses livres ouverts ; Et dans le ciel en feu de son âme sonore Vous montez, Triomphants, peuple vêtu d’aurore. Libérateurs, ô jours promis à l’univers. Vertu du chant ! Déjà la glèbe qui t’adore Tantôt s’azure et rit, tantôt rêve et se dore. Derrière les coteaux étincelle la mer. Comme une ode en plein ciel s’enlacent les nuages, Un vent élyséen traîne sur les feuillages, Et la Paix lumineuse est au fond de L'éther.