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de mener ses chiens à la chasse trop matin, se ce n’est en esté pour le grant chaut. Encore veuill-je que en esté le souloill soit levé, au moins d’une toise de haut. Quar null chien[1], qui ait acoustumé de chassier de près, ne vorra chassier la fort longe : et tout chien, qui hara acoustumé de chassier de fort longe chassera encore plus voulentiers de près. Briefvement le chassier et requerir d’un lièvre en queuque temps que ce soit, se fasse tout einsi comme j’ai dit du quérir ; si en faudra pou si les chiens sont bons.

Aucuns mauveis chasseurs sont qui vont querant le lièvre tout de reng, et ne leur chaut comment qu’ils fassent, mès que elle saille, et ne leisseront ja fère à ses chiens leur mestrise de l’aler trouver, qui est une des plus belles qui soyent en la chasse du lièvre. Cieulz gens feroyent bien de chiens de bonne nature mauveis. Mes quant le bon veneur quiert bien et diligentement une lièvre et la chasse et la requiert, et les chiens s’aperçoyvent que leur meistres le veult, et il leur en fet bons pleisirs et bonnes cuyrées lors metent ilz grant poine en querir et requerir un lièvre quant ilz l’ont failli et ne le veulent leissier jusques tant qu’il soit mort, pour les bonnes cuyrées, et pour ce que leur mestre leur aprent.

Et quant ilz l’ont prise à force, il doit mettre lièvre en terre devant tous ses chiens et deffendre que null ni touche, de son estortoire, et le fere abayer une piesse. Et doit mettre une litière, comme j’ay dit du chevreul, à terre, et mettre du pain dedenz le sang du lièvre ; et s’il est home qui le puisse fère, il doit fere porter de la char cuyte et du froumage et metre tout ensemble sur la litière. De la chair du lièvre ne doit il point donner à ses chiens, quar elle est fastieuse[2] viande et les fet

  1. Quar null chien, c’est-à-dire : car un chien qui ait coutume de, etc. Voyez la note 2 de la page 207.
  2. Fastieuse. Dans le manuscrit de Neuilly ont lit festueuse. Peut-être faut-il entendre lourde. Ce mot viendrait alors de l’expression latine fascis, faix, fardeau. Guillaume de Lorris, qui a écrit les 4,150 premiers