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Page:Gaston Phoebus - La Chasse, J-Lavallee, 1854.djvu/42

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compagnons de plaisir ; mais ce fut pour son malheur. Le 29 janvier 1393, à un bal que donnait la reine, il figura avec le roi dans une funeste mascarade. Le roi, déguisé en satyre, conduisait cinq seigneurs habillés comme lui et enchaînés les uns aux autres. Ils étaient vêtus de toile enduite de poix sur laquelle on avait appliqué des étoupes. Soit par accident, soit par malveillance, le duc d’Orléans ayant approché un flambeau, les étoupes s’enflammèrent. Le roi fut sauvé ; mais Ivain et trois autres seigneurs moururent au bout de quelques jours couverts d’horribles brûlures.

Tous les historiens ont placé Gaston au rang des meilleurs princes. Ce n’est pas qu’il faille justifier pour cela quelques actes de violence regrettables dans sa carrière ; mais il fut pleuré de ses sujets. Il avait su assurer leur repos et leur prospérité ; car c’est une vérité que l’histoire de nos jours a trop démontrée : ce n’est pas la douceur, l’humanité des princes, qui fait le bonheur des États. Avant toute autre vertu il faut aux souverains une main ferme et prudente qui maintienne l’ordre et qui comprime les factions. À cet égard, Gaston Phœbus, le destructeur de la Jacquerie, l’adversaire implacable des Routiers et des Tuschins, était doué au plus haut point de cette sagesse rigoureuse qui assure le calme des États.

Gaston fut d’ailleurs l’ami, le protecteur des lettres ; lui-même il les cultiva avec succès. Il composa beaucoup de poésies dans la langue de ses montagnes, et parmi ces vieux refrains populaires qui font retentir les vallées du Béarn, s’il se trouve des couplets brillants de fraîcheur, de grâce et de naïveté, on les attribue encore au bon comte de Foix. Les prières qu’il a laissées sont écrites partie en français, partie en latin. Elles portent l’empreinte de son caractère. On y retrouve le prince et même le chasseur. A-t-il une comparaison à choisir, c’est au chenil qu’il l’emprunte.

« Péchiez, je vous puis bien comparer à la morsure d’un chien enragié ; car la morsure est petite, mais le venin est très grand ; car premièrement il enfle ; puis après il rend