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et en queconque angoisse tu me veoyes par ta intercession ie sente laide de toy du vray Dieu omnipotent ie te pri, sil puet estre, que me faces manifeste ma fin. Et quant larme me istra du corps ne me laisses espoventer aux diables ni escharnir, ne ne me laisses geter à la fosse de desesperation, et ne me deguerpis iusques a tant que tu me meines en la mayson de mon créateur, ou perdurablement avec tous les sains ie puisse ecleescier.

X

Très hault et très bénigne et très amoureux Diex créateur et gouverneur de toutes créatures a ta très grant bonté ie confesse tous mes pechiez en quelconque manière ie les aye fais, de puis cette heure que ie eu premièrement cognoissance iusques aore, en laquele par ta grant misericorde tu me soutiens encore à vivre, de tout sires vrayement ie ne puis estre en mémoire tant en va. Mais très piteux seigneur et très misericors Diex au quel sont manifestées toutes choses aincoys quelles se facent, qui es véritable regardeur de cogitations et es très droiturier cercheur des cuers, tu sires sœs tous mes pechiez quielx que iaye faiz ou encore fais, ou dedans marme par cogitation, ou dehors par opérations, et pour ce que veritablement say que toutes ces choses sont manifestes a toy, de toutes cestes que ie entens que iay faytes contre ta voulenté devant toy et devant teus tes saincts ie me confesse et me tieing obligie et en coulpe, et se ce nest que ta benigne misericorde aincois me secoure après la mort de la char, ie creing destre perpétuellement dampné et ie scay très doulx Diex que tu mas fait de ta grant miséricorde et mas eu en dilection, serait ce bien raison que ie tamasse et te doubtasse et a tes commandemens obéisse, tu fis ce, sire, pour amour de moy et non pas par ton proufit.

Car tu n’es souffreteux de nul bien, car tu meismes es bien, et par toy est bon ce que bon est, et meilleur tu ne puez estre. À toy mon vray créateur et très miséricors sires tes commandemens ay desprisiez et très orgueilleusement me suis porté, véritablement fermeté ay perdue, et voye de perdition et de mort encourue. Vanité et vent de vaine élation, folement suy ie manifesté très piteux Diex