— Ah ! tu as compté les mois, petite fille ; fiez-vous donc à ces mines discrètes !
— J’aime M. d’Aspremont, répondit gravement la jeune fille.
— Voilà l’enclouure, fit sir Joshua Ward, qui, tout imbu des idées de Vicè et d’Altavilla, se souciait médiocrement d’avoir pour gendre un jettatore. — Que n’en aimes-tu un autre ?
— Je n’ai pas deux cœurs, dit Alicia ; je n’aurai qu’un amour, dussé-je, comme ma mère, mourir à dix-neuf ans.
— Mourir ! ne dites-pas de ces vilains mots, je vous en supplie, s’écria le commodore.
— Avez-vous quelque reproche à faire à M. d’Aspremont ?
— Aucun, assurément.
— A-t-il forfait à l’honneur de quelque manière que ce soit ? S’est-il montré une fois lâche, vil, menteur ou perfide ? Jamais a-t-il insulté une femme ou reculé devant un homme ? Son blason est-il terni de quelque souillure secrète ? Une jeune fille, en prenant son bras pour paraître dans le monde, a-t-elle à rougir ou à baisser les yeux ?
— M. Paul d’Aspremont est un parfait gentleman, il n’y a rien à dire sur sa respectabilité.
— Croyez, mon oncle, que si un tel motif existait, je renoncerais à M. d’Aspremont sur l’heure, et m’ensevelirais dans quelque retraite inaccessible ; mais nulle autre raison, entendez-