Page:Gautier - Œuvres de Théophile Gautier, tome 1.djvu/254

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

chaud, nous louerons une maison de campagne aux environs de Tours, ou bien encore à Cannes, où lord Brougham possède une belle propriété, et où ces damnables superstitions de jettature sont inconnues, Dieu merci. — Que dites-vous de mon projet, Alicia ?

— Vous n’avez pas besoin de mon approbation, ne suis-je pas la plus obéissante des nièces ?

— Oui, lorsque je fais ce que vous voulez, petite masque, » dit en souriant le commodore qui se leva pour regagner sa chambre.

Alicia resta quelques minutes encore sur la terrasse ; mais, soit que cette scène eût déterminé chez elle quelque excitation fébrile, soit que Paul exerçât réellement sur la jeune fille l’influence que redoutait le commodore, la brise tiède, en passant sur ses épaules protégées d’une simple gaze, lui causa une impression glaciale, et, le soir, se sentant mal à l’aise, elle pria Vicè d’étendre sur ses pieds froids et blancs comme le marbre une de ces couvertures arlequinées qu’on fabrique à Venise.

Cependant les lucioles scintillaient dans le gazon, les grillons chantaient, et la lune large et jaune montait au ciel dans une brume de chaleur.