Page:Gautier - Œuvres de Théophile Gautier, tome 1.djvu/333

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blantes ; la matrone, le verbe haut, l’air revêche et dédaigneux, se carrait dans son importance et querellait son mari, au grand amusement de la salle. — Tous ces personnages entraient et sortaient par trois portes pratiquées dans le mur du fond et communiquant au foyer des acteurs. — La maison de Stalino occupait un coin du théâtre, et celle de son vieil ami Alcésimus lui faisait face. Ces décorations, quoique très bien peintes, étaient plutôt représentatives de l’idée d’un lieu que du lieu lui-même, comme les coulisses vagues du théâtre classique.

Quand la pompe nuptiale conduisant la fausse Casina fit son entrée sur la scène, un immense éclat de rire, comme celui qu’Homère attribue aux dieux, circula sur tous les bancs de l’amphithéâtre, et des tonnerres d’applaudissements firent vibrer les échos de l’enceinte ; mais Octavien n’écoutait plus et ne regardait plus.

Dans la travée des femmes, il venait d’apercevoir une créature d’une beauté merveilleuse. À dater de ce moment, les charmants visages qui avaient attiré son œil s’éclipsèrent comme les étoiles devant Phœbé ; tout s’évanouit, tout disparut comme dans un songe ; un brouillard estompa les gradins fourmillants de monde, et la voix criarde des acteurs semblait se perdre dans un éloignement infini.

Il avait reçu au cœur comme une commotion électrique, et il lui semblait qu’il jaillissait