Page:Gautier - Œuvres de Théophile Gautier, tome 1.djvu/428

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Un jour Oluf appelle Dietrich, son fidèle écuyer ; il lui dit de seller son cheval.

« Maître, regardez comme la neige tombe, comme le vent siffle et fait ployer jusqu’à terre la cime des sapins ; n’entendez-vous pas dans le lointain hurler les loups maigres et bramer ainsi que des âmes en peine les rennes à l’agonie ?

— Dietrich, mon fidèle écuyer, je secouerai la neige comme on fait d’un duvet qui s’attache au manteau, je passerai sous l’arceau des sapins en inclinant un peu l’aigrette de mon casque. Quant aux loups, leurs griffes s’émousseront sur cette bonne armure, et du bout de mon épée fouillant la glace, je découvrirai au pauvre renne qui geint et pleure à chaudes larmes la mousse fraîche et fleurie qu’il ne peut atteindre. »

Le comte Oluf de Lodbrog, car tel est son titre depuis que le vieux comte est mort, part sur son bon cheval, accompagné de ses deux chiens géants, Murg et Fenris, car le jeune seigneur aux paupières couleur d’orange a un rendez-vous, et déjà peut-être, du haut de la petite tourelle aiguë en forme de poivrière, se penche sur le balcon sculpté, malgré le froid et la bise, la jeune fille inquiète, cherchant à démêler dans la blancheur de la plaine le panache du chevalier.

Oluf, sur son grand cheval à formes d’éléphant, dont il laboure les flancs à coups d’épe-