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Page:Gautier - Chanson de Roland onzieme edition 1881.djvu/199

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CXXIX

Le roi Marsile est resté au haut d’une montagne,
Tandis que Grandoigne descend dans le bas de la vallée :
Son gonfanon est attaché par trois clous d’or :
" Barons, " s’écrie-t-il, " à cheval ! "
Mille cors retentissent, mille cors au son clair,
El les Français de dire : " Dieu le Père, que ferons-nous ?
" Ah ! maudit soit le jour où nous vîmes Ganelon :
" C’est lui qui nous a traîtreusement vendus.
" À l’aide, à l’aide, les douze Pairs ! »
L’Archevêque alors leur répond :
" Bons chevaliers, voici le jour où vous recevrez grand honneur :
" Dieu vous va donner couronnes et fleurs,
" Au Paradis, entre les glorieux.
" Quant aux lâches, il n’y a point pour eux de place là-haut.
" — Nous ferons tous ce que vous voulez, " répondent les Français.
" Dussions-nous y mourir, nous ne serons pas félons envers Dieu. "
Ils éperonnent des éperons dorés
Et se jettent sur ces maudits, sur ces traîtres.Aoi.

CXXX

Le roi Marsile partage en deux son armée :
Il en garde dix colonnes avec lui,
El voici que les dix autres chevauchent pour engager la bataille.
" Dieu ! " s’écrient les Français, " notre perle est certaine.
" Que vont devenir les douze Pairs ? "
Et l’archevêque Turpin de leur répondre avant tous autres :
" Bons chevaliers, vous êtes les amis de Dieu.
" Voici le jour où vous allez être fleuris et couronnés ;
" Voici le jour où vous reposerez dans les saintes fleurs du Paradis.
" Quant aux lâches, ils n’y entreront jamais.
" — Nous n’y devons pas faillir, " disent les Français.