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Page:Gautier - Chanson de Roland onzieme edition 1881.djvu/371

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Et se jette sur le païen qui tient le Dragon ;
Si bien que sur place il écrase à la fois
Le Dragon et l’enseigne de l’Émir.
Baligant voit ainsi tomber son gonfanon ;
Il voit l’étendard de Mahomet rester sans défense.
L’Emir commence à s’apercevoir
Que le droit est du côté de Charles, que le tort est de son côté.
Et déjà voici les païens qui montrent moins d’ardeur.
Et l’Empereur d’appeler ses Français :
« Dites, barons, pour Dieu, m’aiderez-vous ?
« — Le demander serait une injure, » répondent-ils.
« Maudit soit qui de tout cœur ne frappe ! »Aoi.

CCLXXXVIII

Le jour passe, la vêprée s’avance ;
Païens et Francs frappent de leurs épées.
Ceux qui rassemblèrent ces deux armées, Charles et Baligant, sont des vaillants.
Toutefois ils n’oublient pas leurs cris d’armes.
« Précieuse ! » crie l’Émir.
« Monjoie ! » réplique l’Empereur.
Ils se reconnaissent l’un l’autre à leurs voix claires et hautes ;
Au milieu même du champ de bataille, tous deux se rencontrent.
Ils se jettent l’un sur l’autre, et s’entre - donnent -de grands coups. — -
Frappant de leurs épieux sur leurs écus à rosaces,
Ils les brisent au-dessous de la large boucle
Et se déchirent les pans de leurs hauberts ;
Mais ils ne s’atteignent pas plus avant ;
Les sangles de leurs chevaux sont brisées et leurs selles renversées ;
Bref, les deux rois tombent, et les voilà par terre ;
Vite ils se relèvent, et les voici debout.
Très valeureusement ils tirent alors leurs épées.
Ce duel ne peut désormais finir,
Il ne peut s’achever sans mort d’homme.Aoi.