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Page:Gautier - Chanson de Roland onzieme edition 1881.djvu/424

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serait mort sans l’aide providentielle de Didier et de ses Lombards, (Ibid., 1199-1953.) Enfin, les païens sont vaincus. Altumajor, forcé de devenir chrétien, remet à l’Empereur Logrono et Estella. (Ibid., 1830-2474.) Devant les Français victorieux, il ne reste plus guère que Marsile, et ce sera désormais le grand adversaire de Charles et de Roland. On agit d’abord avec lui par la diplomatie, et, sur la proposition de Ganelon, on lui envoie deux ambassadeurs, Basin de Langres et son compagnon Basile. Ils sont pendus sur l’ordre de Marsile, et cette violation du droit des gens sera plus tard rappelée avec horreur dans la Chanson de Roland. (Ibid., 2597-2704.) Un tel crime ne déconcerte d’ailleurs ni Ganelon ni Charlemagne, et l’on décide d’envoyer une seconde ambassade à Marsile. Guron est choisi : il est surpris par les païens, et n’a que le temps, après une résistance sublime, de venir expirer aux pieds de Charles, qui le vengera. (Ibid., 3140-5850.) La rage s’allume au cœur de l’Empereur, et la guerre recommence. Les Français après une éclatante victoire sur Malceris, entrent tour à tour dans Tudela, Cordres, Charion, Saint-Fagon, Masele et Lion. (Ibid., 3831-5773.) Le poème se termine en nous montrant l’armée chrétienne maîtresse d’Astorga. Charles possède l’Espagne, toute l’Espagne…, à l’exception de Saragosse.

Suivant une légende, ou plutôt suivant une imagination différente de tous nos autres récits, Charles ne serait pas resté sept années, mais vingt-sept ans en Espagne. Cette version n’est consacrée que par le poème de Gui de Bourgogne (seconde moitié du XIIe siècle). L’auteur suppose que l’Empereur et ses barons ont vieilli de l’autre côté des Pyrénées, et tellement vieilli, que leurs fils, laissés par eux au berceau, sont devenus, en France, de beaux jeunes hommes pleins d’ardeur. Or ce sont ces jeunes gens qui s’avisent un jour d’aller rejoindre leurs pères en Espagne, comme la jeune garde venant à l’aide de la vieille. Ils avaient voulu tout d’abord se donner un roi, et Gui, fils de Samson de Bourgogne, avait été élu d’une voix unanime. C’est Gui qui a eu l’idée de l’expédition d’Espagne, et qui exécute de main de maître un projet si hardi. (Gui de Bourgogne, vers 1-391.) Gui s’empare successivement de Carsaude (Ibid., 392-709), de Montorgueil et de Montesclair (Ibid., 1621-3091), de la Tour d’Augorie (Ibid., 3184-3413) et de Maudrane. (Ibid., 3414-3717.) Le seul adversaire redoutable que rencontre le vainqueur, c’est Huidelon ; mais il se convertit fort rapidement et devient le meilleur allié des Français. Il ne reste plus maintenant à la jeune armée qu’à rejoindre celle des vieillards, celle de Charles. C’est ce que Gui parvient à faire, après avoir donné les preuves d’une sagesse au-dessus de son âge. Un jour enfin, les jeunes chevaliers peuvent tomber aux bras de leurs pères (Ibid., 3925-1024), et c’est une joie inexprimable. Puis, les deux armées combinées s’emparent de Luiserne, que Dieu engloutit miraculeusement. (Ibid., 1137-1299.) Le signal du départ est alors donné à tous les Français. Et où vont-ils ainsi ? À Roncevaux. (Ibid., 1300-1301.)

Ici commence la Chanson de Roland, dont la scène, à vrai dire, devrait se placer immédiatement après la Prise de Pampelune. Mais nous n’avons pas besoin de résumer ici le poème dont nous venons de publier le texte et la traduction. Le rôle de Charlemagne n’y est pas, comme on le sait, effacé par celui de Roland, et l’Empereur garde réellement le premier rang. C’est lui qui, dans la première partie de la Chanson, réunit son conseil pour délibérer avec lui de la paix proposée par