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BAIN TURC.

sur le corps. Quand vous êtes un peu séché, il vous reprend et vous polit avec la paume la main nue, chassant le long de vos bras de longs rouleaux grisâtres, qui surprennent beaucoup les Européens, convaincus de leur propreté ; d’un coup sec, le tellack fait tomber ces escarres et vous les montre d’un air de satisfaction.

Un nouveau déluge emporte ces copeaux balnéatoires, et le tellack vous flagelle doucement de longues étoupes imbibées de mousse savonneuse ; il sépare vos cheveux et vous nettoie la peau de la tête, opération suivie d’une autre cataracte d’eau fraîche pour éviter les congestions cérébrales que pourrait déterminer l’élévation de la température.

Mon baigneur était un jeune garçon macédonien de quinze à seize ans, dont la peau, macérée par une immersion continuelle, avait acquis un ton bistré uni et une finesse incroyable ; — il n’avait plus que les muscles, — tout son embonpoint s’était évaporé, — ce qui ne l’empêchait pas d’être vigoureux et bien portant.

Ces différentes cérémonies terminées, on m’embobelina de linges secs, et l’on me ramena à mon lit, où deux petits garçons me massèrent une dernière fois. — Je restai là une heure à peu près, dans une rêverie somnolente, prenant du café et des limonades à la neige ; et, quand je sortis, j’étais si léger, si dispos, si souple, si remis de ma fatigue, qu’il me semblait

Que les anges du ciel marchaient à mes côtés !