Page:Gautier - Constantinople, Fasquelle, 1899.djvu/260

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

XXI

LE CHARLEMAGNE. — LES INCENDIES


L’on pariait depuis longtemps de l’arrivée du Charlemagne, qui se faisait attendre, — et il était passé à l’état de vaisseau chimérique, de navire Argo ou de voltigeur hollandais, — lorsqu’un beau matin on vit, au moment où l’on n’y pensait plus, se prélasser devant l’échelle de Top’Hané, à l’entrée de la Corne-d’Or, un superbe bâtiment sous pavillon tricolore, portant à sa proue un buste d’empereur, et à sa poupe ce nom écrit en lettres d’or : Charlemagne. Comment était-il venu là ? Par quelle magie se trouvait-il au milieu du port ? À ses flancs sabordés d’une triple ligne d’embrasures de canons, nulle trace de tambour pour les roues ; sur son pont, aucune apparence de tuyau ; aux vergues, des voiles carguées et ficelées ; aux mâts, des flammes que faisait onduler un vent contraire : c’était à n’y rien comprendre. Aussi, parmi le peuple, le bruit se répandit-il que c’était une nef magique manœuvrée par les Djinns et les Afrites.