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L’ATMEÏDAN.

soutenaient, dans le temple de Delphes, le trépied d’or voué par la Grèce reconnaissante à Phœbus-Apollon, dieu sauveur, après la bataille de Platée, gagnée sur Xerxès. Constantin fit, dit-on, transporter la colonne Serpentine de Delphes à sa nouvelle ville. Une tradition moins en faveur, mais plus probable, selon moi, si l’on considère le peu de valeur artistique du monument, n’y veut voir qu’un talisman fabriqué par Apollonius de Thyane pour conjurer les serpents. — Je laisse le lecteur libre de choisir entre ces deux origines.

Quant à la Pyramide murée de Constantin Porphyrogénète, qu’on mettait à côté des sept merveilles du monde, à une époque, il est vrai, où les exagérations les plus hyperboliques ne coûtaient rien, ce n’est plus qu’un noyau de maçonnerie, qu’un informe amas de pierres effritées par la pluie, dévorées par le soleil, pleines de poussière et de toiles d’araignées, fendillées de lézardes, menaçant ruine de tous côtés, et n’ayant plus aucune signification au point de vue de l’art.

Cette armature de maçonnerie était revêtue autrefois de grandes plaques de bronze doré bosselées de bas-reliefs et d’ornements qui, par le poids et le prix du métal, devaient exciter la cupidité des déprédateurs. Aussi la pyramide de Constantin ne tarda-t-elle pas à être dépouillée de son vêtement splendide et n’en resta-t-il qu’un bloc noirci de quatre-vingts pieds de haut. Cette pyramide d’or, que les paroxystes du temps comparaient au colosse de Rhodes, devait en effet resplendir magnifiquement sous le ciel bleu de Constantinople, parmi les splendides monuments de l’art antique, au-dessus des colonnades du Cirque, encombrées de spectateurs en somptueux habits. Mais, pour se le figurer, il faut que la pensée fasse un travail complet de restauration.

Autrefois les Turcs faisaient courir leurs chevaux et