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ILLUSTRATIONS DE PAUL ET VIRGINIE.

fleurs, des madras aux couleurs vives le sac d’argent répand ses écus à travers le ventre d’un O. Mille charmantes perspectives s’ouvrent inopinément au milieu des phrases ; c’est une clairière dans les bois avec sa trouée de jour, un site montagneux tout hérissé de rocailles, de plantes bizarres et découpant l’horizon de ses grêles dentelures ; c’est un marais où tremblent les roseaux, où les nénuphars étendent nonchalamment leurs larges feuilles dans des eaux opaques et huileuses, rayées çà et là de quelques brusques filaments de lumière, et qui n’a pour personnage qu’un héron à aigrette, le col méditativement renfoncé dans les épaules, et la patte levée en l’air et repliée sous le ventre ; ou bien une cascade filtrant à travers les roches et couvrant d’une poussière d’écume les troncs d’arbres voisins, tachetés de noires plaques de mousse. C’est la mer, sous mille aspects, tantôt douce et tranquille, n’ayant que des lignes transversales, tantôt tourbillonnante, échevelée, furieuse et représentée par des écheveaux de hachures nerveuses, convulsives, inextricablement brouillées sous les doigts de l’ouragan les vaisseaux et les barques fuyant comme des cygnes, les ailes ouvertes, ou labourant péniblement le dos monstrueux des vagues, les pingouins et les albatros tournoyant dans les nuages, tout ce que la nature des Antilles peut offrir de caractéristique et de pittoresque. Et, vers la fin, la chaste et pâle figure de