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FUSAINS ET EAUX-FORTES.

l’abeille nous comptons bien qu’il y aura beaucoup d’hôtels sculptés et dorés sous la jeune République. Ce seront les chaumières qu’on abattra, et non les châteaux.

Ces châteaux, se les transmettra-t-on par voie d’hérédité ? Pourquoi pas ? L’homme possède imprescriptiblement deux choses : son âme et son corps, c’est-à-dire son intelligence et sa force ; de l’union de ces deux puissances dirigées par la volonté il résulte le travail qui produit tout ; un propriétaire n’est qu’un travailleur capitalisé toute propriété est le produit d’un travail, soit récent, soit ancien. Nous admettons même, contre l’opinion de certains théoriciens modernes, que la conquête et la spéculation ont pu créer la propriété. La conquête, c’est la victoire, c’est la récompense d’efforts militaires ; la spéculation, c’est souvent l’idée et parfois le bonheur, puissance distributive et mystérieuse dont on ne saurait nier le bon droit. L’héritage, « cette main tendue par le père à l’enfant à travers le mur du tombeau relie les générations entre elles et établit le beau dogme de la réversibilité. D’ailleurs, n’héritons-nous pas collectivement des races antérieures ? Cette civilisation dont nous jouissons n’est-elle pas le produit des efforts et des travaux de nos ancêtres ? Cette terre fertile que nous foulons, ils l’ont défrichée. Le travail crée des valeurs qui n’existaient pas, sans rien prendre aux paresseux ni aux pauvres.