Page:Gautier - Histoire du romantisme, 1874.djvu/416

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drin et à ses pompes et n’emploie que les vers de sept ou de huit pieds séparés en petites stances, mais quel merveilleux doigté ! Jamais le clavier poétique n’a été parcouru par une main plus légère et plus puissante. Les tours de force rhythmiques se succèdent accomplis avec une grâce et une aisance incomparables. Liszt, Thalberg, Dreyschok ne sont rien à côté de cela. À la fin du volume, le poète enfourche sa monture impatiente, lui donne de l’éperon et s’enfonce dans l’infini.

Du fond de la tombe, Alfred de Vigny nous tend de sa main d’ombre le volume des Destinées, sa plus belle œuvre peut-être, où se trouve un chef-d’œuvre de tristesse hautaine et de robuste mélancolie : le poëme de Samson. L’Hercule juif sait qu’il est trahi par Dalilah, et, volontairement, par dégoût des petites ruses de la courtisane, il se laisse prendra au piège grossier qu’il pourrait rompre d’un mouvement. Mais à quoi bon ? L’amour de l’homme ne provoque-t»il pas toujours la trahison chez la femme,


La femme, enfant malade et douze fois impur ?


Autant en finir tout de suite. Jamais vers plus magnifiques n’ont exprimé la satiété de l’héroïsme et le blasement de la force.

Des réimpressions de l’œuvre poétique de Sainte-Beuve ont fait connaître de nouvelles pièces du savant critique, d’un charme exquis et d’une délicatesse rare ; Dans les Sylves, Auguste Barbier, l’au-