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ISOLINE

Damont vint rue de l’Horloge, pour voir le commandant, qui ne venait plus à la cabane ; le brave marin avait une grâce à lui demander : il bégaya horriblement.

Il était repris du désir de naviguer, on s’abrutissait à rester toujours à terre. Si le commandant voulait l’inscrire, sur les registres du bord, en qualité d’aide-timonier, il comblerait tous ses vœux.

— « Je te comprends, mon brave Damont : tu veux me suivre, me surveiller, m’arracher malgré moi à quelque acte de désespoir. C’est inutile, va : quand j’ai pris une résolution, rien ne peut m’en détourner.

— Si quand j’étais sous vos ordres vous avez été satisfait de mes services, si vous me portez quelque intérêt, ne me refusez pas ! s’écria Damont, avec une véhémence qui triompha du bégaiement.

— Soit ! dit-il, puisque tu le veux. »

Et il rouvrit sa malle pour y prendre un livre relié en toile verte.

Damont regarda son nom sortir de la plume qui grinçait. Son trouble redoubla.

— « Si ce n’est pas trop abuser, dit-il pourtant, inscrivez aussi mon filleul !  : un gamin qui n’a pas de famille et veut partir marin.