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LA TUNIQUE MERVEILLEUSE.

qu’ils purent leur départ, pour abréger l’épreuve de leur compagnon ; leur présence, les réchauds, les lumières, échauffaient un peu cette chambre glaciale ; mais on pouvait deviner ce qu’elle serait abandonnée à elle-même.

— « Prends garde, dit Pen-Kouen à voix basse à Cœur-de-Rubis ; tu sais, plusieurs personnes sont mortes de froid, ces jours derniers, dans les rues, et ici, c’est comme dans la rue ; malgré mes fourrures, je suis gelé.

— Je veux tenter l’aventure, répondit le jeune homme ; pense donc, si demain je suis vivant, Fleur-de-Roseau est à moi.

— Courage, ami ! » dit Pen-Kouen, en lui serrant la main.

Tout le monde fut obligé de se retirer, et Cœur-de-Rubis resta seul, sans feu, sans lumière, dans la grande salle que le froid envahissait.

— « Me voici dans une jolie situation, se dit-il. Plût au ciel que le manteau du bonze barbare fût tel que je l’ai décrit ! »

La bise soufflait sous toutes les portes et faisait une musique extraordinaire.

La pleine lune, qui brillait dans un ciel limpide,