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L’ORIENT.

canne à pommeau d’argent, devant les carrosses du dix-septième et du dix-huitième siècle, n’auraient été que des tortues auprès de ces saïs si lestes, si bien découplés, aux larges poumons, aux jambes fines et nerveuses, qui devancent aisément les chevaux, à quelque allure que le cocher les mette, et souvent s’arrêtent pour les attendre. Derrière les saïs venait, à quelque distance, une calèche élégante de fabrique anglaise ou viennoise, avec un Arnaute en fustanelle pour cocher, contenant un haut fonctionnaire d’un embonpoint majestueux, ayant devant lui son secrétaire, grec ou arménien, à mine intelligente et maigre, comme il convient à un subalterne. Ou bien encore un coupé mystérieux, avec des roues relevées de filets d’or, accompagné de nègres à cheval, au buste court, aux longues jambes, aux joues parfaitement glabres, où l’on entrevoyait dans l’interstice du voile, ou bourko, des yeux de diamant noir, et à travers l’entre-bâillement de l’habbara, des éclairs d’or et de pierreries, des miroitements de soie jaune, rosée ou