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L’ORIENT.

faut qu’il ne fasse une libation et un sacrifice au dieu humide, comme un Égyptien du temps des pharaons.

« Je l’avais imaginé très-beau, s’écrie-t-il dans le lyrisme de son enthousiasme, bien immense, couvert d’îlots où dorment les crocodiles, large et fécondant. Je ne m’étais pas trompé. Pendant six mois enfermé dans ma cange, j’ai vécu sur le Nil, que j’ai remonté et descendu ; chaque jour, du lever au coucher du soleil, j’ai regardé ses bords qui sont presque des rivages. Qu’il traverse les champs cultivés, qu’il baigne les pylônes des temples écroulés, qu’il arrose les forêts de palmiers, qu’il bondisse sur les noirs rochers des cataractes, qu’il s’élargisse jusqu’à ressembler à une mer, qu’il soit rétréci entre ses berges herbues, qu’il ait ses tempêtes quand souffle le khamsin, ou qu’il coule paisiblement sous le soleil, qu’il se gonfle ou s’abaisse, à toute heure je l’ai admiré, je l’ai sans cesse trouvé grand, pacifique et superbe, et j’ai toujours envié le sort de ceux qui sont nés sur les rives que j’irai voir encore. On cherche les sour-