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LE HACHICH.

tant des ailes si étranges, que je me tordais de rire dans mon coin, et que, pour m’associer à la bouffonnerie du spectacle, je me mis à lancer mes coussins en l’air, les rattrapant et les faisant tourner avec la dextérité d’un jongleur indien. L’un de ces messieurs m’adressa en italien un discours que le hachich, par sa toute-puissance, me transposa en espagnol. Les demandes et les réponses étaient presque raisonnables, et reculaient sur des choses indifférentes, des nouvelles de théâtre ou de littérature.

Le premier accès touchait à sa fin. — Après quelques minutes, je me retrouvai avec tout mon sang-froid, sans mal de tête, sans aucun des symptômes qui accompagnent l’ivresse du vin, et fort étonné de ce qui venait de se passer. — Une demi-heure s’était à peine écoulée que je retombai sous l’empire du hachich. Cette fois la vision fut plus compliquée et plus extraordinaire. Dans un air confusément lumineux, voltigeaient avec un fourmillement perpétuel des milliards de papillons dont les ailes bruissaient comme des éventails. De gi-