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Page:Gautier - L’Usurpateur, tome 2.djvu/112

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Il la porta à l’ombre d’un buisson de thé et l’étendit sur l’herbe, puis il se laissa tomber sur un genou, tremblant d’émotion, éperdu, fou. L’étourdissement de la course qu’il venait de faire, la fatigue du combat et de la nuit passée sans sommeil troublait son esprit ; il s’imaginait rêver ; il regardait celle qui sans relâche emplissait sa pensée et bénissait l’illusion qui lui faisait croire qu’elle était devant lui.

Étendue dans une pose abandonnée et souple, très-pâle, la tête renversée, le corps enveloppé par les plis fins de sa robe en crêpe lilas que soulevaient les battements précipités de son cœur, elle semblait dormir. Sa manche s’était un peu relevée, découvrait son bras ; sa petite main posée sur l’herbe, la paume en l’air, semblait une fleur de nénuphar.

— Quelle souveraine beauté ! se disait le prince extasié ; certes la déesse Soleil n’est pas plus resplendissante ! Il semble qu’une lumière transparaît à travers la blancheur de sa peau, sa bouche est rougie par le sang d’une fleur, ses grands yeux sous leurs longs cils noirs ressemblent à deux hirondelles noyées dans du lait. Ne te dissipe pas, vision céleste, reste toujours ainsi, mon regard rivé à toi !

Peu à peu le sentiment de la réalité lui re-