Page:Gautier - L’Usurpateur, tome 2.djvu/181

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Bientôt le public favorisé, qui a pu retenir des places à l’avance, arrive de tous côtés. Sur les deux ponts qui se courbent au-dessus du canal à droite et à gauche du théâtre, les norimonos, les cangos, s’avancent au pas régulier des porteurs et se succèdent sans discontinuer ; de toutes les rues débouchent d’autres palanquins. La laque noire luit au soleil, les toilettes des femmes, qui se hâtent d’entrer, ont l’éclat frais de fleurs épanouies. Quelques jeunes hommes arrivent à cheval ; ils jettent la bride au valet qui les précédait en courant et gravissent rapidement l’escalier du théâtre. Abritées sous de larges parasols, plusieurs familles s’avancent à pied. Sur le canal, un encombrement de bateaux assiège le débarcadère, les bateliers échangent des injures, les femmes mettent pied à terre avec de petits cris d’effroi. Elles sont suivies par des servantes qui portent des coffres magnifiques en ivoire sculpté, en nacre, en bois de santal. La salle est bientôt remplie et l’on ferme les portes.

À l’intérieur, le théâtre a la forme d’un carré long. Le parterre est divisé par des cloisons basses en une série de compartiments égaux : aucun chemin ménagé pour gagner ces sortes de casiers, c’est sur la crête de ces petites murailles de bois assez larges pour qu’on puisse y poser les doux pieds que