Page:Gautier - L’Usurpateur, tome 2.djvu/242

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Ils s’engagèrent dans une longue allée bordée de buissons, pleine d’une brume argentée.

— Écoute, dit-elle, ne me condamne pas sans m’entendre. Bien des choses se sont passées depuis que tu as quitté Kioto. Sache, ami, que le jour dont le souvenir me charme encore malgré moi, le jour où tu m’as sauvée et où nous nous sommes parlé longuement, assis au pied d’un buisson, un homme nous épiait.

— C’est impossible ! s’écria le prince épouvanté.

— C’est certain. Celui qui m’avait enlevée, au lieu de fuir, est revenu et nous a écoutés. C’était un espion de Hiéyas. Cet homme perfide a su profiter du secret que son serviteur avait surpris, il l’a révélé au mikado. D’abord le fils des dieux n’y a pas cru, il était encore plein de colère contre l’infâme qui ensanglante le pays. Mais, par d’habiles manœuvres, Hiéyas parvint à changer les dispositions du mikado et à gagner sa confiance. On lui donna pour preuve de notre entente criminelle ton dévouement et ta conduite héroïque lors de l’attaque de Kioto. Un jour le fils des dieux me fit demander, et lorsque je fus en sa présence il me tendit un écrit dans lequel notre conversation était rapportée, mais dénaturée et