Page:Gautier - L’art moderne, Lévy, 1856.djvu/15

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pleins de conviction, prendre au pied de la lettre le sens du nom de l’édifice eût été une tentative d’une appropriation trop rigoureuse.

Chenavard, imbu des idées panthéistes, fait de l’église de la naïve patronne de Paris le temple du génie humain ; il écrit sur ces vastes murailles l’histoire synthétique de ce grand être collectif, multiple, ondoyant, ubiquiste, éternel, composé de tous les hommes de tous les temps, dont l’âme générale est Dieu, et qui, en marche depuis Adam, s’avance d’un pas ferme et sûr vers le but connu de lui seul. La légende et l’apothéose de l’humanité, telle est la tâche gigantesque que l’artiste s’est imposée : il a voulu montrer, en outre, que la Raison pure prêtait autant à la beauté et aux développements pittoresques, que les mythologies et les symbolismes recommandés comme les plus poétiques. Les dessins que nous avons vus nous permettent, dès aujourd’hui, d’affirmer que le problème est résolu victorieusement. A part le talent que le peintre y peut mettre, n’y a-t-il pas autant de poésie, de haute moralité, de beauté véritable enfin, dans la représentation des grandes actions et des hommes illustres, l’honneur de la famille humaine, sans distinction de lieu, de temps et de secte, que dans celle de miracles et de martyres, où l’art n’est pas plus respecté que la vérité historique ?

Nous allons tâcher de donner une idée de ce travail colossal, qui intéresse si vivement le public et les artistes. Quelques explications architecturales sont nécessaires pour faire bien comprendre l’ordre et l’enchaînement des compositions que nous avons à décrire.

Le Panthéon a la forme d’une croix grecque, c’est-à-dire dont les branches sont d’égale longueur, contrairement à