Page:Gautier - L’art moderne, Lévy, 1856.djvu/70

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Les compositions précédentes nous ont montré l’humanité dans son développement historique et théogonique. Celle-ci nous la fait voir sous son côté métaphysique ; c’est, en quelque sorte, la théologie de l’auteur. Jusqu’à présent, il n’a fait que retracer avec le crayon les phases diverses de la vie du grand être collectif. Il raconte, il n’explique pas. Ici, sous des symboles transparents et plastiques, il développe sa théorie philosophique.

Au sommet du cercle, sur un de ces fonds de splendeurs constellés d’étoiles comme Dante en fait rayonner dans les cercles les plus élevés de son paradis, flamboie une figure colossale pleine de douceur, de puissance, de majesté et d’inspiration. On la prendrait d’abord pour le Christ ; mais c’est une puissance supérieure au Christ lui-même qui ne fut qu’un de ses hérauts : le Verbe !

Le Verbe se mouvant dans la lumière, c’est-à-dire, la Raison éclatante, rapide, irrésistible, voilà la divinité que Chenavard place au ciel supérieur ; le Verbe, c’est le Dieu suprême qui domine de sa taille gigantesque les olympes inférieurs et subalternes, car les degrés de la hiérarchie céleste s’établissent d’après les portions plus ou moins grandes que les dieux reflètent de la raison universelle.

La lumière est la forme du Verbe. Le premier mot prononcé sur le néant produisit le jour ! Cette parole : Que la lumière soit ! fit éclater dans le vide des milliards d’étoiles et de soleils.

La puissante formule d’évocation vient d’être prononcée, et les mondes tourbillonnent dans une lueur éblouissante. Les anges nés avec la lumière célèbrent à grand renfort de clairons la promulgation du Verbe, dont la personnification colossale se tient debout, les bras étendus