nous accusent de trop aimer notre vieille poésie religieuse et nationale. De ces œuvres de rhéteurs ennuyeux, la Patrie et Dieu sont absents. Nous ne descendrons pas à les admirer.
os. — Tel est le sort que méritent tous les traîtres. » — « Bien dit, s’écrie l’Empereur : Salomon a bien parlé. — Mais, à mon gré, c’est encore trop de lenteurs. »
« Sire Empereur, dit Ogier le vassal, — J’ai trouvé quelque chose de plus affreux. — Qu’on jette Ganelon au fond de cette tour — Où ne pénètre point la clarté du soleil. — Il sera là, tout seul, avec les bêtes qui sortiront de terre — Et qui, de toutes parts, à droite et à gauche, — Viendront l’assaillir et lui feront grand mal. — Que, pour tout l’or du monde, on ne lui donne ni à boire ni à manger. — Quelle honte, quel supplice ! Puis, on l’amènera devant le palais principal — Et on lui permettra de manger, à votre beau festin, — Des mets assaisonnés de poivre et de sel. — Mais qu’on ne lui donne rien à boire, ni eau, ni vin. — Et alors, dans une épouvantable angoisse, — Il mourra de soif, tout comme Roland à Roncevaux. » — « L’admirable idée ! dit Charles. — Mais je ne veux pas que ce traître pénètre ainsi chez moi. — Seigneurs, ajoute l’Empereur, francs chevaliers loyaux, — Ce supplice m’irait bien, mais j’en sais un qui est plus douloureux encore. — Qu’on attache Ganelon à la queue de plusieurs chevaux, et qu’il soit écartelé. — Oui, que mes comtes et mes vassaux aillent là-haut, — Que mes barons sortent tous, et ils vont assister au supplice du Traître. » À ces mots, prévôts et sénéchaux s’emparent de Ganelon.
Charles le roi a fait publier son ban : — « Que tous s’en aillent en dehors de la cité. » — L’Empereur lui-même est monté en selle sur une mule — Et s’en est rapidement allé. — Les bourgeois sont là, qui désirent vivement assister à ce spectacle. — Suivant le commandement de Charles, — On traîne Ganelon hors de la ville — Et tous y sont allés après lui. — Voilà ce que l’on fait du traître. — On y a conduit aussi de bons chevaux, — Quatre fortes juments qui, en vérité, — Sont sauvages et cruelles. — Charlemagne ordonne — Qu’un garçon monte sur chacune d’elles. — Aux quatre queues on a noué les pieds et les mains de Ganelon. — Puis, les quatre cavaliers éperonnent leurs montures. — Dieu ! voyez, voyez la sueur couler sur le visage du misérable. — « Maudite, peut-il se dire, maudite l’heure où je suis né ! » — Un tel châtiment est juste, puisque Ganelon a trahi les barons — Dont la douce France est orpheline. — Les cavaliers ont la bonne idée — De faire aller leurs quatre chevaux de tous les côtés — Pour que l’infâme meure plus horriblement. — Que vous dirai-je enfin ? Ils l’ont tant et tant écartelé — Que l’âme s’en va, et les diables l’emportent. — Charles le voit, et il en remercie Dieu en son cœur : — « Soyez béni, mon Dieu, dit le Roi, — Puisque j’ai pu venger le très-sage Roland, — Olivier et les douze Pairs. »
« Barons, dit Charles, tous mes vœux sont accomplis, — Puisqu’il est mort, celui qui m’a ravi tout mon orgueil. — C’est lui qui m’a enlevé