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INTRODUCTION

l’énumération de ces travaux consacrés à notre vieux poëme. Il me semble même qu’on n’a pas suffisamment rendu justice à l’érudition française. Nous croyons que l’initiative, la patience, la pénétration, la critique même, avec la méthode, l’esprit et la clarté, n’ont pas été le privilége de l’Allemagne. Mais, il faut l’avouer, l’édition de M. Müller est la seule qui soit véritablement critique. C’est lui qui le premier a su utiliser, pour établir son texte, le manuscrit de Venise et tous nos Remaniements, le Ruolandes Liet et le Karl de Stricker. Il a vu, d’un œil net, toutes les lacunes de la version d’Oxford ; il les a comblées par autant d’extraits empruntés aux textes de Venise, de Paris et de Versailles. Il a corrigé mille fautes évidentes du scribe si médiocre et si distrait qui a écrit le texte de la Bodléienne. Il a remis cinq cents vers sur leurs pieds. Il a replacé dans leur ordre logique des strophes qui avaient été bouleversées. Depuis sept ans, depuis dix ans peut-être il prépare avec une patience héroïque, et nous promet une Introduction où il doit éclaircir les dernières ténèbres qui enveloppent encore notre Épopée nationale. Cependant, mécontent de lui, il va nous offrir une nouvelle édition de son texte, plus parfaite, plus critique encore. Il y fera sans doute un plus constant emploi de cette Karlamagnus’s Saga, à laquelle M. G. Paris espère emprunter de bonnes variantes et dont le jeune savant français nous a donné en 1864 une analyse si intéressante[1]. Les fragments néerlandais publiés par M. Bormans[2] ne lui seront pas d’une utilité très-considérable, et M. G. Paris les a réduits à leur juste valeur[3], en leur restituant leur caractère véritable, qui est celui d’une traduction et non pas d’un original de nos vieux poëmes. Mais, dans les notes de sa nouvelle édition, M. Müller devra faire usage de l’Histoire poétique de

  1. La Karlamagnus’s Saga, Histoire islandaise de Charlemagne, dans la Bibliothèque de l’École des Chartes, nov.-déc. 1863, et sept.-oct. 1864.
  2. La Chanson de Roncevaux, fragments de rédactions thioises, avec une Introduction et des Remarques par J.-H. Bormans. Bruxelles, Hayez, 1864.
  3. Bibliothèque de l’École des Chartes, mars-avril 1865.