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LA CHANSON DE ROLAND


CIX


La bataille cependant est devenue très-rude :
Français et païens y échangent de beaux coups.
Les uns attaquent, les autres se défendent.
Que de lances brisées et rouges de sang !
Que de gonfanons et d’enseignes en pièces !
Et que de bons Français perdent là leur jeunesse !
Ils ne reverront plus leurs mères ni leurs femmes,
Ni ceux de France qui les attendent là-bas, aux défilés.


CX


Charles le Grand en pleure et se lamente :
Hélas ! à quoi bon ? Ils n’en recevront pas de secours.
Ganelon leur a rendu un mauvais service,
Le jour qu’il alla dans Saragosse faire marché de sa propre maison.
Mais, depuis lors, il en a perdu les membres et la vie :
Plus tard, à Aix, on le condamna à être écartelé,
Et, avec lui, trente de ses parents
Qui ne comptaient point sur une telle mort...


CXI


La bataille est merveilleuse et pesante :
Olivier et Roland y frappent de grand cœur ;
L’archevêque Turpin y rend des milliers de coups ;
Les douze Pairs ne sont pas en retard.
Tous les Français se battent et sont en pleine mêlée ;
Et les païens de mourir par cent et par mille.
Qui ne s’enfuit ne peut échapper à la mort :
Bon gré, mal gré, tous y laissent leur vie.