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LA CHANSON DE ROLAND

« Quant à tous les autres, je ne les prise pas un gant.
« Il est certain que l’Empereur est revenu, qu’il est là ;
« Un Syrien, mon messager, vient de me l’annoncer.
« Charles a formé dix corps d’armée immenses ;
« Il est brave, celui qui sonne l’olifant du Roi ;
« Par ces sons clairs il rassemble ses compagnons.
« Ceux-ci chevauchent en tête de l’armée, devant le premier rang ;
« Quinze mille Français sont avec eux,
« De ces jeunes que Charles appelle enfants ;
« Et il y en a quinze mille autres derrière eux
« Qui très-vigoureusement frapperont. »
« Malprime alors : « Je vous demande l’honneur du premier coup.


CCXXXV


« — Beau fils Malprime, dit Baligant,
« Tout ce que vous me demandez, je vous l’accorde ;
« Donc, allez sans plus tarder assaillir les Français.
« Emmenez avec vous Torleu, le roi de Perse,
« Et Dapamort, le roi de Lithuanie ;
« Si vous pouvez mater le grand orgueil de Charles,
« Je vous donnerai un pan de mon royaume,
« Tout le pays depuis Chériant jusqu’au Val-Marquis.
« — Merci, mon seigneur, » répond Malprime.
Il passe en avant, et reçoit la tradition symbolique de ce présent.
Or c’était la terre qui appartint jadis au roi Fleuri.
Mais jamais Malprime ne devait la voir ;
Jamais Malprime ne devait en être investi ni saisi.


CCXXXVI


À travers tous les rangs de son armée, chevauche l’Émir,
Et son fils (il avait la taille d’un géant) le suit partout,