Page:Gautier - La Comédie de la mort.djvu/116

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J’aime mieux errer seul sur l’eau profonde et large.
Aux barques de pêcheur l’anse à l’abri du vent,
Aux simples naufragés de l’âme, le couvent.
À moi la solitude effroyable et profonde,
Par dedans, par dehors !

Par dedans, par dehors !Un couvent, c’est un monde ;
On y pense, on y rêve, on y prie, on y croit :
La mort n’est que le seuil d’une autre vie ; on voit
Passer au long du cloître une forme angélique ;
La cloche vous murmure un chant mélancolique ;
La Vierge vous sourit, le bel enfant Jésus
Vous tend ses petits bras de sa niche ; au-dessus
De vos fronts inclinés, comme un essaim d’abeilles,
Volent les Chérubins en légions vermeilles.
Vous êtes tout espoir, tout joie et tout amour,
À l’escalier du ciel vous montez chaque jour ;
L’extase vous remplit d’ineffables délices,
Et vos cœurs parfumés sont comme des calices ;
Vous marchez entourés de célestes rayons
Et vos pieds après vous laissent d’ardents sillons !

Ah ! grands voluptueux, sybarites du cloître,