Page:Gautier - La Comédie de la mort.djvu/267

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Plus dégouttants de pleurs qu’après la pluie un arbre,
Étaient debout, pareils à des piliers de marbre.

C’était, certe, un spectacle à faire réfléchir,
Et je sentis mon cou, comme un roseau, fléchir
Sous le vent que faisait l’aile de ma pensée,
Avec le chant du soir, vers le ciel élancée.
Je croisai gravement mes deux bras sur mon sein,
Et je pris mon menton dans le creux de ma main,
Et je me dis : « Ô Christ ! tes douleurs sont trop vives ;
Après ton agonie au jardin des Olives,
Il fallait remonter près de ton père, au ciel,
Et nous laisser à nous l’éponge avec le fiel ;
Les clous percent ta chair, et les fleurons d’épines
Entrent profondément dans tes tempes divines.
Tu vas mourir, toi, Dieu, comme un homme. La mort
Recule épouvantée à ce sublime effort ;
Elle a peur de sa proie, elle hésite à la prendre,
Sachant qu’après trois jours il la lui faudra rendre,
Et qu’un ange viendra, qui, radieux et beau,
Lèvera de ses mains la pierre du tombeau ;
Mais tu n’en as pas moins souffert ton agonie,
Adorable victime entre toutes bénie ;