Page:Gautier - La Conquête du paradis.djvu/191

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quer d’abord le Carnatic, renverser le nabab Allah-Verdi, s’emparer d’Arcate, et, maître alors d’une armée, marcher contre l’usurpateur Nasser-Cingh. Mais — ce que tu désires depuis si longtemps arrive enfin ! — ils demandent en grâce que tu mettes à leur disposition une petite troupe de Français, que tu sois leur allié, car alors ils seront sûrs du succès, puisque tu es, disent-ils, « le Lion de la Victoire. »

Une singulière flamme illumina les yeux de Dupleix.

— Ils ajoutent, dit encore la bégum, que si tu acceptes, tu leur dicteras tes conditions.

Le gouverneur affecta un grand calme pour répondre.

— Je suis heureux de pouvoir rendre service à mon ami Chanda-Saïb, dit-il, au légitime successeur de la nababie du Carnatic. Par bonheur, nos victoires me permettent de mettre à sa disposition quatre cents Français, et sept cents cipayes disciplinés. Aussitôt l’agrément du conseil supérieur obtenu, je ferai partir ce détachement, car je sais qu’en pareille circonstance la promptitude est la moitié du succès.

La musulmane se jeta dans les bras de la bégum quand elle lui eut traduit cette réponse, et Aly-Résa baisa avec effusion la main de Dupleix.

— Nous te devions la vie, nous te devrons la puissance, dit-il. Mon père veut que je le rejoigne pour combattre à ses côtés. Quand tu le permettras, je partirai.

— Nos soldats te feront escorte, dit le gouverneur ; voici les pluies qui cessent ; dans peu de jours vous vous mettrez en route.

— Merci, dit Aly-Résa ; je vais expédier un courrier à mon père, pour lui porter l’heureuse nouvelle.