Page:Gautier - La Conquête du paradis.djvu/289

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

çaises commandées par vous. Tout n’est pas pacifié du côté de la capitale et le roi considère son trône comme chancelant si nous ne le soutenons pas.

— J’espère que vous ne doutez pas de mon obéissance, et que sûr de mon consentement à tout ce que vous ordonnerez, ce n’est pas à cause de moi que vous hésitez.

— Votre consentement était indispensable, mon ami ; ne vous dissimulez pas que ce départ serait une sorte d’exil, lointain et long ; mais d’autres raisons encore me retiennent : le rival de Chanda-Saïb est vaincu, mais vivant ; il est vrai qu’il nous demande la paix, et renonce au Carnatic, mais c’est pour gagner du temps ; comme un serpent mal écrasé, dès qu’il le pourra, il relèvera la tête. S’il n’avait derrière lui les Anglais, je ne le craindrais nullement ; mais ils le soutiendront de tout leur pouvoir, ne serait-ce que pour nous braver.

— Comment, monsieur, s’écria Bussy, malgré la paix conclue entre la France et l’Angleterre, vous croyez les Anglais capables de prendre les armes contre nous ?

— Ils l’ont fait déjà et le feront le mieux du monde ; ils sont trop ulcérés de leurs défaites pour les oublier jamais. Qui sait même s’ils n’ont pas deviné déjà mon désir secret de donner l’empire de l’Inde à la France ? Vous pensez bien qu’ils m’entraveront le plus possible, et leur pays les soutient, eux, vous savez comment ; tandis que nous !… Voyez comme on me comprend peu : le traité d’Aix-la-Chapelle rend Madras aux