Page:Gautier - La Conquête du paradis.djvu/336

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— Tu lui as si bien caché que tu ne le haïssais plus.

Ourvaci secoua la tête :

— Pas assez, hélas !

— Déclarons-nous la guerre au roi du Dekan ? demanda Lila en souriant.

— Plus tard.

— Et l’ambassadeur, le recevrons-nous ?

— Méchante ! s’écria Ourvaci, qui ne put retenir un sourire, ne faut-il pas lui faire oublier l’insolence de la première réception, dont j’ai vraiment honte aujourd’hui. Viens, assemblons le conseil, afin que l’on prépare tout pour un accueil digne d’un roi.

Pendant ce temps, la caravane cheminait, trop lentement au gré de l’ambassadeur, qui sentait sa tristesse s’adoucir à mesure qu’il approchait de Bangalore.

C’était Ganésa, magnifiquement harnaché, qui le portait, dans un houdah à double dôme soutenu par des colonnettes d’or ciselé ; et toute une foule de cavaliers, d’éléphants, de chameaux, le suivait. Les populations accouraient sur son passage, pour le voir, pour l’acclamer. On jonchait sa route de fleurs et de palmes, on la sablait de poudre de santal.

Il y avait dans son cortège des prêtres, des astrologues, des bayadères, des umaras, dont Arslan-Khan, devenu le fidèle ami du marquis, était le chef. De quart d’heure en quart d’heure, les timbales royales résonnaient et, alternant avec elles, des bardes, faisant vibrer des harpes, chantaient les louanges, les hauts faits du glorieux passant, ou quelque antique légende guerrière.