Page:Gautier - La sœur du soleil.djvu/195

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au rebord de l’ouverture. Bientôt il y enfonça le torse, puis les jambes, et disparut.

— Il doit faire encore plus noir là-dedans qu’ici, dit Nata qui collait son oreille contre la jonque.

Ils attendirent. Le temps leur sembla long. La même anxiété les rendait immobiles.

Enfin, un craquement se fit entendre. Raïden sentit la planche osciller. Une seconde secousse la fit saillir hors de ses rainures.

— Assez ! assez ! ou tu es perdu ! dit Raïden, sans oser élever la voix.

Mais l’enfant n’entendait rien ; il continuait à frapper de ses poings fermés avec toute sa force. Bientôt la planche se détacha et vint flotter au-dessus des flots.

En même temps, avec un bruit de torrent, l’eau se précipita dans le navire.

— Et l’enfant ! l’enfant ! s’écria le prince avec angoisse.

Raïden plongeait désespérément ses bras dans l’ouverture béante, noire et tumultueuse.

— Rien rien ! disait-il en grinçant des dents. Il a été emporté par la force de l’eau.

À ce moment, des cris se tirent entendre sur une des jonques voisines des lumières couraient sur le pont ; elles semblaient dans l’obscurité se mouvoir en l’air.

— Nos amis ont peut-être besoin de nous, dit Nata.

— Nous ne pouvons abandonner ce pauvre enfant, dit le prince, tant qu’il reste l’espoir de le sauver ; nous ne bougerons pas d’ici.

Tout à coup, Raïden poussa un cri de joie : il venait de sentir une petite main crispée sur le rebord de la trouée faite au navire.

Il eut bientôt tiré l’enfant à lui ; il le jeta dans la barque.