Page:Gautier - La sœur du soleil.djvu/52

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Le frémissement d’une robe, froissant les nattes qui couvraient le plancher, le tira de sa rêverie Iza-Farou revenait ; elle paraissait se hâter et apparut bientôt au tournant de la galerie ; deux jeunes garçons, magnifiquement vêtus, la suivaient.

— Voici les paroles de la divine Kisaki, dit-elle lorsqu’elle fut près de Nagato : « Que le suppliant vienne lui-même solliciter ce qu’il désire. »

À ces mots Nagato devint d’une telle pâleur, qu’lza-Farou, effrayée, croyant qu’il allait s’évanouir, se précipita vers lui pour l’empêcher de tomber.

— Prince, s’écria-t-elle, remets-toi ; une telle faveur est en effet capable de causer une vive émotion, mais n’es-tu pas habitué à tous les honneurs ?

— C’est impossible murmura Nagato, d’une voix à peine distincte, je ne peux paraître devant elle.

— Comment, dit Iza-Farou, veux-tu donc désobéir à son ordre ?

— Je ne suis pas en costume de cour, dit le prince

— Elle te dispense pour cette fois du cérémonial, la réception étant secrète. Ne la fais pas attendre plus longtemps.

— Partons, conduis-moi, s’écria tout à coup Nagato qui sembla dompter son émotion.

— Ces deux pages te guideront, dit Iza-Farou.

Nagato s’éloigna rapidement, précédé des deux serviteurs de la Kisaki, mais il put entendre encore un cri étouffé qui s’échappa des lèvres de Fatkoura.

Après avoir marché quelque temps et traversé, sans les voir, des galeries et des salles du palais, Nagato arriva devant un grand rideau de satin blanc brodé d’or, dont les larges plis aux cassures brillantes, argentés dans la lumière, couleur de plomb dans la pénombre, s’amassaient abondamment sur le sol.