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le collier des jours

férais en raconter moi-même. C’était une habitude que j’avais prise tout à coup, et dont je fatiguais avec insistance les auditeurs forcés.

Ce qu’étaient ces histoires, je n’en ai aucune idée, je me souviens seulement que l’art des transitions, dans le récit, me manquait complètement… Je n’avais qu’une seule formule : Et puis… Et puis !… si bien que les tantes agacées, me criaient :

— Dis donc quelquefois : citerne.

Je ne comprenais pas le sens de l’ironie, mais je tenais compte de l’observation et au lieu de dire « et puis… » je disais quelquefois « et citerne ».

L’histoire que je racontais ce jour-là à grand-père, tendait à lui démontrer qu’il devait me prêter sa canne, la terrible canne dont il me menaçait quand il me pourchassait à travers champs ! « Comme j’étais malade, des gens méchants venaient la nuit, pour m’empêcher de dormir, mais s’ils voyaient la canne, ils n’oseraient pas approcher. » Je parvins à le persuader, car la canne à pommeau d’argent était couchée à côté de moi quand je m’endormis.

Le bon docteur Pellarin, penché sur mon bras foulé, ne se méfiait pas et fut bien surpris de recevoir, tout à coup, sur le dos, des