Page:Gautier - Le Dragon Impérial, Armand Colin et Cie, 1893.djvu/264

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— Pourquoi tous ces gens s’agitent-ils ainsi ?

— Parce que les Chinois dévorent enfin la bannière jaune de Tartarie !

— Tu parles sans respect de la race impériale, dit le religieux avec courroux.

— D’où viens-tu donc ? Défendrais-tu encore la race de l’usurpateur ?

Sans répondre, le religieux s’approcha d’un groupe de soldats chinois et leur dit :

— Arrêtez cet homme ; il insulte l’empereur.

— Quel empereur ? répondirent-ils.

— Est-ce que le Ciel a un autre fils que Kang-Shi ? s’écria le religieux d’une voix menaçante.

— Kang-Shi n’est qu’un traître bâtard, dit un soldat ; le Ciel n’a qu’un fils légitime, ce n’est pas Kang-Shi.

— Qui a dit cela ?

— Notre pa-tsong, qui a reçu mille liangs pour le croire.

Le religieux, crispant ses poings, s’éloigna en silence. Il se mêla à des curieux qui entouraient un homme monté sur une pierre. Mince, petit, élégant malgré des vêtements sordides, cet homme donnait lecture d’une proclamation, et ses yeux pétillaient d’intelligence derrière d’immenses lunettes bordées de noir. Une vieille femme loqueteuse, à côté de lui, était assise sur un sac bien gonflé.

« Aujourd’hui, criait-il, premier jour de la septième lune de notre règne magnanime, nous-même lumineux empereur Ta-Kiang, que le Ciel chérit avons décidé dans notre suprême bonté ce qui suit