reux, s’arrête court, tourne bride, revient ventre à terre.
La reine est restée à cheval, si pâle qu’elle semble une statue d’ivoire. On lui a enlevé sa cuirasse pour comprimer sous les plis d’une écharpe sa poitrine qui saigne. Dans l’ardeur du combat ses cheveux se sont dénoués sous le casque ; l’héroïsme et la fièvre l’ont resplendir ses yeux.
— Merci, Lée-Line, dit-elle, je te dois ces dernières heures de victoire. C’est grâce à toi que mon sang, comme un sceau royal, a mis sa marque sur le sol ennemi. La fin est venue pourtant, et c’est ici l’adieu suprême !
— L’adieu !… non, pas entre nous : me voici, et où tu iras, j’irai.
Leurs chevaux se touchent, Lée-Line soutient de son bras la reine qui défaille et appuie sa tête lasse sur l’épaule du guerrier.
— La vie nous a séparés, dit-elle, puisse la mort nous réunir. Regarde dans mon cœur, la blessure, en ouvrant ma poitrine, l’a mis à nu… Regarde, tu y verras ton image ; il était le temple où je gardais ton souvenir. Ô compagnon de mon printemps !
— Ah ! ne restons pas sur la terre ! s’écria Lée-Line, ce n’est plus notre place : le pasteur de buffles est devenu l’égal des dieux.
— Tes yeux brillent comme des phares à l’entrée des pays célestes ; ils m’annoncent le repos délicieux après la tempête.