Page:Gautier - Le Roman de la momie, Fasquelle, 1899.djvu/104

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criaient leurs ordres, indiquant les manœuvres nécessaires pour se diriger à travers le dédale mouvant des embarcations. Parfois, malgré les précautions, les bateaux se choquaient, et les mariniers échangeaient des injures ou se frappaient de leurs rames.

Ces milliers de nefs, peintes la plupart en blanc et relevées d’ornements verts, bleus et rouges, chargées d’hommes et de femmes vêtus de costumes multicolores, faisaient disparaître entièrement le Nil sur une surface de plusieurs lieues, et présentaient, sous la vive couleur du soleil d’Égypte, un spectacle d’un éclat éblouissant dans sa mobilité ; l’eau agitée en tous sens fourmillait, scintillait, miroitait comme du vif-argent, et ressemblait à un soleil brisé en millions de pièces.

Tahoser entra dans sa cange, décorée avec une richesse extrême, dont le centre était occupé par une cabine ou naos à l’entablement surmonté d’une rangée d’uræus, aux angles équarris en piliers, aux parois bariolées de dessins symétriques. Un habitacle à toit aigu chargeait la poupe, contrebalancée à l’autre extrémité par une sorte d’autel enjolivé de peintures. Le gouvernail se composait de deux immenses rames