Page:Gautier - Le Roman de la momie, Fasquelle, 1899.djvu/222

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corniches évasées, les colosses aux mains posées sur les genoux se dessinaient, dorés par un rayon de soleil, sans que l’éloignement pût leur ôter de leur grandeur. Mais ce n’étaient pas ces orgueilleux édifices que regardait Pharaon ; parmi les bouquets de palmiers et les champs cultivés, des maisons, des kiosques coloriés s’élevaient ça et là, tachetant la teinte vivace de la végétation. Sous un de ces toits, sous une de ces terrasses, Tahoser se cachait sans doute, et, par une opération magique, il eût voulu les soulever où les rendre transparents.

Les heures succédèrent aux heures : déjà le soleil avait disparu derrière les montagnes, lançant ses derniers feux à Thèbes, et les messagers ne revenaient pas. Pharaon gardait toujours son attitude immobile. La nuit s’étendit sur la ville, calme, fraîche et bleue ; les étoiles se mirent à scintiller et à faire trembler leurs longs cils d’or dans l’azur profond ; et sur le coin de la terrasse le Pharaon silencieux, impassible découpait ses noirs contours comme une statue de basalte scellée à l’entablement. Plusieurs fois les oiseaux nocturnes voltigèrent autour de sa tête pour s’y poser ; mais, effrayés par sa respiration lente et profonde, ils s’enfuyaient en battant des ailes.