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le second rang du collier

le piano, et Henriette, sa sœur, le violoncelle, sans parler de l’harmonie, du contrepoint et du solfège. Toute la famille était de petite taille, et les fillettes paraissaient encore moins que leur âge : le violoncelle, bien réduit pourtant, avait l’air d’un mastodonte à côté de la mignonne Henriette, qui était forcée de monter sur un tabouret pour l’atteindre de son archet.

Ma sœur et moi, beaucoup moins avancées et surveillées dans nos études musicales, nous nous vengions de nos studieuses camarades, toujours occupées quand nous voulions nous divertir avec elles, en les traitant de « petits phénomènes », ce qui, je ne sais trop pourquoi, les terrifiait singulièrement.

Nous nous essayions cependant quelquefois à de la musique d’ensemble, avec Alphonse, quand sa mère l’amenait à Neuilly. Mais il faut avouer que, dans ces séances, où nous étions livrés à nous-mêmes, c’était le fou rire, le plus souvent, qui battait la mesure.

Tandis que les portes fermées étouffaient un peu notre charivari, Regina et Théophile Gautier causaient ensemble, longuement, et avec un très vif plaisir. Mais il y avait dans la maison de Neuilly un continuel va-et-vient. Des importuns, des visiteurs, rompaient le tête-à-tête des deux amis, et les empêchaient de dévider tranquillement le fil de leur conversation. Aussi mon père préférait-il encore aller voir Mme Lhomme chez elle, où l’on était sûr