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le second rang du collier

cien taïping, qui avait conspiré. Il s’était battu et un de ses bras gardait la marque d’une affreuse blessure : — Nono l’avait vue ; — un canon en bambou, serré par des cordes, en éclatant lui avait enlevé une large tranche de chair. Traqué, réduit à la plus grande misère, pendant une famine terrible, il avait été sauvé, par des missionnaires, à la condition qu’il se ferait chrétien.

— Pas tourner Chine !… continuait à murmurer le Chinois, très effrayé.

Que faire pour lui, alors, s’il ne voulait pas s’en aller ?

Le garder, et l’héberger, à la façon orientale, telle fut la conclusion de mon père.

— As-tu envie d’apprendre le chinois, me dit-il, et d’étudier un pays presque encore inconnu, et qui semble prodigieux ? Ce ouistiti mélancolique a l’air très intelligent. Il doit être lettré, puisque l’évêque Callery l’avait choisi pour travailler à son dictionnaire. Veux-tu essayer de dévider cet homme jaune et de voir ce qu’il cache au fond de sa cervelle obscure ?

Si je le voulais !…

Je ne répondis que par une série de cabrioles, que le Chinois regarda de ses yeux obliques, en plissant tout entier son front, mais, par politesse, sans manifester aucune surprise.

Et c’est ainsi que Ting-Tun-Ling devint le Chinois de Théophile Gautier.