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le second rang du collier

ses tableaux. Le teint pâle et olivâtre, l’air languissant et délicat, on pouvait le croire touché par cette mal’aria qu’il savait si bien peindre. Les traits réguliers, les yeux très doux sous de longs cils noirs, la lèvre rouge dans l’ombre floconneuse de la barbe noir bleu, il semblait être né à Florence ou dans les États romains.

À son retour de la Villa Médicis, il avait été victime d’un accident terrible. Une tempête avait assailli son navire tout près de Marseille, et le jeune peintre, enlevé par une lame, s’était éveillé, d’un long évanouissement, dans un lit d’hôpital, la jambe affreusement brisée. Il lui restait de cette brisure une légère boiterie, qui accentuait son apparence fragile, bien trompeuse, en réalité, car ce noble artiste a fourni une longue et belle carrière, et son talent, toujours en ascension, brille aujourd’hui du plus vif éclat.

Hébert jouait du violon, avec beaucoup de sentiment. Il apportait souvent à Neuilly son instrument.

Mme Ganneau et son fils, M. et Mme Laffite, Baudry, Puvis, Dumas fils, l’excellent pianiste Delaborde, Olivier de Gourjault, Madarasz, Rodolfo et Toto, naturellement, étaient parmi ceux qui venaient le plus souvent.

Au dîner, le nombre des convives n’était jamais certain et, comme cela arrive presque toujours en pareil cas, il tournait autour du chiffre treize, chiffre fatal et redouté de tous.