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le second rang du collier

le monopole des institutions de premier ordre. Externes d’abord, nous allâmes chez madame Liétard, une noble personne, qui, par amour des enfants et pour se consoler de la perte des siens, avait fondé cet établissement, où l’on était vraiment gâté plus que chez soi ; puis pensionnaires, chez une madame Biré. Elle portait une perruque bouclée, — « un tour en acajou ronceux », disait mon père, qui avait une aversion spéciale pour cette dame.

Ces tentatives ne furent pas de longue durée : mon père trouvait vraiment la maison trop déserte et trop triste, sans le mouvement et le bruit que nous y mettions et, pour être sûr de nous garder, il eut un jour une triomphante idée, celle de faire lui-même notre éducation :

— J’en suis aussi capable que vos sous-maîtresses !… Et, bien que je ne sois pas même bachelier, si vous en saviez autant que moi, il me semble que ça ne serait pas mal.

Le principe ordinaire d’instruction qui consiste à entasser pêle-mêle dans la mémoire des notions succinctes sur toutes sortes de sujets lui semblait absurde :

— La science abrégée, et l’histoire ramenée à un point de vue général, n’intéressent pas, disait-il, et c’est pour cela que tout ce que l’on apprend en classe est si vite oublié. Ce travail si pénible, à un âge où l’on a un besoin impérieux