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Page:Gautier - Le Troisième Rang du collier, 4e éd.djvu/259

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LE TROISIÈME RANG DU COLLIER

— Éva, en messager de la paix, devait être délicieuse….

— J’ai aussi gardé l’article de votre père sur Rienzi, qui était très bien, dit Cosima. Wagner a dû lui écrire pour le remercier[1].

— Si l’on reprend Rienzi, dis-je, nous allons aussi reprendre fidèlement notre pèlerinage au théâtre. Pensez que, dix-huit soirs de suite, du fond de Neuilly, par tous les temps, nous sommes allés au Théâtre-Lyrique et que jamais nous n’avons manqué d’entendre l’ouverture !…

  1. Voici cet article publié dans le Journal Officiel :

    « Rarement la curiosité parisienne avait été plus vivement surexcitée par ces simples mots inscrits sur l’affiche du Théâtre-Lyrique : « Mardi, première représentation de Rienzi, opéra en cinq actes, de Richard Wagner. » Dans un temps où certes la préoccupation n’est pas aux œuvres d’art, Wagner a le don de passionner la foule, de provoquer des enthousiasmes frénétiques et des répulsions violentes. Son nom prononcé assemble les nuages dans le ciel le plus serein. L’orage se forme aussitôt ; les éclairs se dégagent en lueurs persistantes, le tonnerre gronde, la foudre éclate à travers la pluie, le vent et la grêle. À ce fracas, personne ne reste paisible, il semble que l’univers va crouler, et chacun court vers l’autel de son dieu menacé. Les chœurs rivaux des admirateurs et des détracteurs s’injurient comme dans la fiancée de Messine et sont prêts à en venir aux mains. C’est une agitation, un tumulte, une furie qui rappellent les grandes luttes romantiques de 1830, où les jeunes bandes d’Hernani se ruaient au théâtre avec leur mot de passe scal-