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LE CAPITAINE FRACASSE.
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Vous avez dit la scène de l’aveu avec une grâce à nulle autre seconde. Je vous ai applaudie à tout rompre. Cette paire de mains qui sonnaient comme battoirs de lavandières, c’était moi !

— Je vous dirai à mon tour : laissons là ces propos et compliments déplacés. Où me menez-vous ainsi, malgré ma volonté, et en dépit de toute loi et convenance ?

— Je ne saurais vous le dire, et cela d’ailleurs vous serait parfaitement inutile ; nous sommes obligés au secret comme les confesseurs et les médecins ; la discrétion la plus absolue est indispensable en ces affaires occultes, périlleuses et fantasques, qui sont conduites par des ombres anonymes et masquées. Souvent, pour plus de sûreté, nous ne connaissons pas celui qui nous fait agir et il ne nous connaît pas.

— Ainsi, vous ne savez pas la main qui vous pousse à cet acte outrageant et coupable d’enlever sur une grande route une jeune fille à ses compagnons ?

— Que je le sache ou que je l’ignore, la chose revient au même puisque la conscience de mes devoirs me clôt le bec. Cherchez parmi vos amoureux le plus ardent et le plus maltraité. Ce sera sans doute celui-là. »

Voyant qu’elle n’en tirerait rien de plus, Isabelle n’adressa plus la parole à son gardien. D’ailleurs, elle ne doutait pas que ce ne fût Vallombreuse l’auteur du coup. La façon menaçante dont il lui avait jeté, du seuil de la porte, ces mots : « Au revoir, mademoiselle, » lors de la visite à la rue Dauphine, lui était