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les cruautés de l’amour

Il resta longtemps ainsi, donnant un libre cours à son désespoir.

Tout à coup il sentit une main se poser sur son épaule. Il leva la tête. Juliette était devant lui.

L’émotion faillit le suffoquer, il ne put trouver une parole, mais il se cramponna à la robe de la jeune fille comme s’il eût craint de la voir s’éloigner.

— Vous êtes un enfant malade, Maurice, dit-elle en posant la main sur le front brûlant du jeune homme. Nous vous guérirons.

Maurice aperçut alors près de sa fille Mme Manivaux qui le regardait de son doux et bienveillant regard et semblait sur le point de pleurer au spectacle de cette douleur.

— Voyez jusqu’où va la faiblesse d’une mère, continua Juliette, elle a lu votre lettre et c’est elle qui n’a pas voulu que je vous abandonne. Je voulais effacer votre nom de mon cœur et elle a intercédé pour vous, cependant je ne vous ai pas pardonné encore, il faut d’abord que vous méritiez le pardon de celle que vous avez gravement offensée et qui dans sa bonté l’a oublié déjà.

— Ma mère ! s’écria Maurice en s’élançant vers Mme Manivaux, qui lui ouvrit les bras en pleurant.